Dix
- Édith Lacroix
- 3 août
- 2 min de lecture
Ce gros chiffre. Déjà. Trop vite. Une fête qu’on ne souhaite pas célébrer, voilà où j’en suis après 10 ans de diagnostic.
Dix ans à espérer, à désespérer. Dix ans à faire comme les autres familles. Et pas du tout aussi.
Dix ans à apprendre une multitude de termes médicaux. Je pourrais gagner au Scrabble avec tous les nouveaux termes que j’ai appris. Mais je ne joue pas.
Dix ans de petits et moyens deuils. En 10 ans, mon fils a appris à courir, à compter, à chanter, à faire des casse-têtes, à grimper, à dessiner, à faire des phrases de plusieurs mots. En 10 ans, mon fils a aussi désappris à faire tout ça. Il ne chante plus. Ne parle plus, à part 2 moitiés de mots. Ne sait plus comment jouer. Et bientôt, il ne saura plus comment marcher. Sombre bilan.
Oh, mais il y a du positif aussi, vous me direz. Bien sûr ! En 10 ans, la médecine a avancé. Plusieurs essais cliniques pour de nouveaux traitements sont en cours. Pour les autres enfants. Y a sûrement d’autres choses positives, mais honnêtement, ces jours-ci, j’ai de la misère à les percevoir. Pardonnez-moi mon défaitisme, mais après 10 ans de diagnostic, j’en suis à me dire que je ne soulignerai sûrement pas celui de 20 ans. Et je crains encore plus de ne pas me rendre au quinzième. Les prochaines années ne se compteront pas en perte d’habiletés acquises, mais en perte de fonctions vitales. Car la maladie enlève tout à mon fils. Arrache tout à mon cœur.

Mais je serai là avec mon Félix-Antoine jusqu’au bout. J’accueillerai les morceaux de sourire dès qu’ils seront là, profiterai de chaque petit moment collé sur lui.
C’est ce que je lui écrivais il y a exactement 10 ans, et comme une promesse, je lui réitère aujourd’hui :
[…] Mais sache que je suis avec toi. Je l’ai toujours été et je le serai toujours. Je serai ton roc, parfois tendre tel un saule pleureur, mais un roc tout de même sur lequel tu pourras t’appuyer pour te reposer, dormir, pleurer et j’espère le moins possible, souffrir. Je traverserai avec toi les mers houleuses de l’inconnu, je prendrai sur mes épaules ton fardeau des douleurs et traitements, et j’essayerai, malgré tout, de constamment ensoleiller la toile de ta petite vie fragilisée.
Je t’aime si fort mon Filou. Et je t’aimerai jusqu’au bout.
Ta maman d’amour
XOXO
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